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Hey Joe !

 

Hey Joe !

« Entre adrar et palmeraie, à travers de vieux ksour en terre ocre et jamais loin de l’agréable murmure de la rivière, une matinée toute printanière.

Ça vole et papillonne dans tous les sens ; cerisiers et amandiers en fleur, la nature renaît.

Déambuler dans ces ksour,  certains en ruine, juste à flanc de cette montagne imposante et silencieuse est vraiment reposant. Sa présence est presque palpable, impressionnante…

Quelques petits écureuils gris de Barbarie commencent à pointer leurs nez au détour des vieux murets de pierre rouge… Herbes folles en bataille sur des aires de battage désertes à jamais.

 -  Hum, c’est bien ça, il va aimer Panoramax, c’est un poète notre shaman.

« Le temps en ces lieux, ne semble plus avoir de prise ; seuls les toitures qui pendent et les murs retournant en poussière témoignent encore de son passage et de l’abandon des hommes. Si les yeux s’abreuvent de cette magie, l’esprit extasié se repaît de sa beauté. »

- Ça aussi j’aime bien. Ah, oui, adrar, c’est le terme que ces berbères utilisent pour désigner leur montagne. Berbères ou barbares, il va falloir que je vérifie auprès de Panoramax.  Et puis ksour, il faut que je note aussi, sinon Panoramax  ne va pas comprendre de quoi je parle. C’est vrai qu’ils sont étranges ces villages en terre, on les confondrait avec la montagne.

- Dis Atarax, t’as vu ces drôles de papillons ? Ils sont aussi gros que Prozax et tout violet avec un drôle de javelot sur le nez. Et puis ces écureuils, à peine plus gros qu’un marcassin… Dis Atarax, tu crois qu’on va voir des romains avec cette chaleur ? Ils sont fous ces romains.

- Tais-toi un peu Estomax, non seulement tu vas faire peur aux écureuils mais tu m’empêches de prendre des notes pour Panoramax qui a été retenu à un festival de Raggax dans la forêt de Brocéliande avec les autres shamans, c’est la saison des festivals chez nous tu sais bien.

- Dis,  Panoramax, il t’a donné une gourde de cognax à emporter ? Moi, mes parents, ils en buvaient trop, alors il dit Panoramax que mes biberons auront un  effet toute ma vie.

- C’est vrai Estomax, regarde, ça n’existe pas les papillons violets, tu vois bien qu’ils sont bleus et qu’ils clignotent au soleil.

 « Les gens sont fort sympathiques et hospitaliers même s’ils ont beaucoup soufferts des envahisseurs. Beaucoup de leurs villages sont détruits, en ruine pour certains, on voit encore les traces de combats. Hier soir, ils nous on invités à un grand mariage. La fille du caïd, ce doit être le chef… »

- Prozax, Prozax ! Viens ici mon chien, tu vas te faire mordre par ces gros papillons bleus qui clignotent au soleil ! Regarde comme il est beau à gambader comme ça après ces papillons, il est bien dressé mon chien, hein, dis Atarax ?

- Laisse-moi tranquille cinq minutes Estomax « … il y avait un musicien, tout noir et le crâne rasé comme un nubien. Il avait un drôle d’instrument de musique en cuivre. Il jouait beaucoup mieux qu’Anthrax notre barde, ça c’est sûr pas et pour chanter aussi, même si on ne comprenait pas grand chose avec son accent. Il avait un drôle de nom aussi, incompréhensible, Papy Groove, ils l’appelaient. En tout cas, une grosse ambiance, surtout les femmes, par Belenax, quel déhanchement ! Et elles jouent aussi sur de petits tambours en terre cuite en poussant des cris aussi étranges que tout le reste, des youyous ça s’appellent, elles m’on dit. Dommage qu’elles soient toutes voilées, surtout la belle Aïcha, ses yeux, et ce déhanché !!!… »
Ça, la fin, c’est pour moi, il n’a pas besoin de tout savoir notre shaman, non mais.

Tout à coup, transpirant  à grosses gouttes et grommelant, l’air hagard, un bonhomme en chaussons apparaît au détour du sentier rocailleux assis sur un char noir et jaune vraiment plus qu’étrange, un bruit d’enfer, et cette fumée toute noire, et ce gros machin dessus avec des cordes. Même qu’il avait un oiseau qui n’arrêtait pas de ricaner bêtement posé sur son épaule.

- M’enfin !!! Qu’est-ce que je fais ici ? Et l’heure de ma sieste, bon tant pis, de toue façon, j’ai oublié mon oreiller… Bonjour messieurs, je suis Lagafax, reporter à Lutèce la Magnifique. Vous n’auriez pas vu, un grand noir tout chauve qui fait de la musique ? J’avais rendez-vous avec lui mais je ne sais pas ce qui s’est passé. Au mariage du chef, ils m’ont fait fumé une drôle de petite pipe en terre et puis plus rien. Le trou. Dîtes, vous avez vu leurs papillons, ils sont étranges, hein ? Jamais vu de papillons gros comme ça avant, et puis, cette couleur arc-en-ciel… un jour d’orage, tu les vois pas. Bon, je peux le trouver où ce mec pour mon interview ? C’est que je fais de la musique moi aussi. Je me disais qu’entre confrères artistes...

- Prozax ! Viens ici, laisse ce petit chien et ces deux bonhommes. Bé ce sont les deux flics frangins des RG, ça ! Regarde Atarax. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien faire ici ces deux énergumènes ? Il n’y a pas un marin qui jure comme un conducteur de chars à bœufs, pire que Poissonax, avec eux d’habitude, et puis ce fouineur de  gamin avec sa houppette toute jaune décolorée ? Regarde, il y a même le petit farfelu avec sa barbichette et son drôle de casque, tu sais bien, celui qui raconte à tout le monde qu’ils ont été sur la Lune avec un char volant. Alors quoi ? Une enquête dans le désert peut-être. Dis Atarax, tu crois qu’ils les ont trouvés ces fameux cigares depuis le temps ? Ils ont dû encore se perdre si ça se trouve. Ou alors… ils sont peut-être venus prendre un bol d’air eux aussi, c’est vrai qu’il est sain l’air ici, va savoir avec ces hurluberlus bachibouzoukés….

- Hey Joe ! Secoue-toi bordel ! C’est l’heure d’aller au taf, le café est prêt.

- Koikigna ? Il est quelle heure Estomax? Fait pas jour.

- L’heure de partir cueillir les pâquerettes dans les bois peut-être.

- Putain ! J’ai fait un drôle de rêve. Total déjanté. Une vraie BD à lui tout seul ce rêve. Même que j’écrivais ! Moi, de la poésie en prose on aurait dit ! Et puis cette musique, et les yeux d’Aïcha… j’ai envie de me rendormir pour la retrouver. Atarax, un drôle de nom que j’avais… Estomax, non, Jeannot, il faut que je te raconte mon rêve, vrai  mec !

- Estomax ! Hey Joe, tes petites pastilles arc-en-ciel, là, et la fumette, il va falloir que tu arrêtes ça, sérieux mec.
Et puis va prendre un peu l’air dehors, tu en as gros besoin…

 

Robert Haïtam

26 mars 2020

Tous droits réservés. 

Cette histoire courte a été écrite dans les cadre d'un concours, 72h, par Short Édition, pour rompre la monotonie du confinement et rassembler les gens autour d'un projet d'écriture.
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2016 12

Date de dernière mise à jour : 23/10/2021

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